Louise Bourgeois autoportrait

La voie du verbe

La Voie du verbe se décline à travers :

✍︎ L'atelier initiatique : trois jours d'écriture en résidentiel, au domaine des Bergerons, dans la Drôme.

✍︎ La retraite approfondie : trois jours d'écriture en résidentiel, au domaine des Bergerons, dans la Drôme.

✍︎ L'atelier de l'âne : une journée d'atelier à Dieulefit, une fois par mois dans la Drôme.

On ne peut pas apprendre à écrire, on ne l’enseigne pas non plus. On peut seulement essayer d’entrouvrir cette porte invisible derrière laquelle se tient le ciel de l’origine que l’écriture convoque à chaque fois qu’elle articule ce dont le corps fait mémoire. Alors le verbe s’incarne dans la langue et l’Homme témoigne de l’être.

Ni développement personnel, ni formation à l’écriture, la voie du verbe cherche la troisième voie, celle qui, implacable et impeccable, est au service du plus grand que soi, quel que soit le nom qu’à « ce plus grand » l’on donne.

Où l’enjeu n’est pas d’apprendre à écrire mais de s’approcher de sa propre langue, unique dans tout l’univers, singulière, par laquelle exister, un beau jour être heureux. Car même si l’écriture ne guérit de rien, il importe de chercher son royaume, et le reste elle le donne par surcroît.

Qu’est-ce qu’une langue ? C’est un élan, un rythme porté par le souffle, une profondeur précise, c’est du silence, une ouverture à l’autre par le biais d’une sensibilité singulière.

Qu’est-ce qu’un chemin d’individuation ? C’est un appel, des obstacles à dépasser, des portes à ouvrir, c’est un affranchissement par-delà les blessures pour sortir de la confusion et accepter la parole perdue. C’est une rencontre avec soi et partant avec l’autre.

En ce sens, l’écriture est thérapeutique. C’est-à-dire qu’elle « prend soin de l’être » pour dévoiler ce qui, de la vérité, nous est sans cesse dérobé.
Tressée au silence, à la lecture, à l’écoute intérieure, elle est, dans son essence, antinomique à l’idée de groupe que suppose tout atelier.
Cependant, c’est là l’occasion d’une communauté de conscience : lorsque d’être partagées les solitudes s’augmentent, et de s’augmenter ainsi ouvrent à une forme de confiance où peut s’épeler le nom de chacun.

Clôture dont les portes fermées ouvrent à l’intérieur de soi, l’la voie du verbe vise avant tout à entrer en résonance avec la question de l’être dont chaque singularité est une lettre indispensable à l’alphabet du monde.
Conçus comme un laboratoire alchimique, les ateliers et la retraite se proposent, à partir d’une multiplicité de pistes, de laisser ouverte la question de l’être tout le temps : ne jamais conclure, ne jamais rien achever, pas de promesse, pas d’échec, pas de menace, juste le vivant toujours ouvert, ouvert, ouvert.
Où l’on constate qu’écrire ce n’est pas produire des textes, mais être avant tout dans un certain rapport de vérité et d’intensité au monde.

« – C’est ton travail. C’est exactement ton destin. Tu ne cesseras jamais de chercher un accord entre ton sentiment intérieur et ton geste extérieur. Tu es née frontière blessée. Tu es la femme du verbe juste, obligée de manifester dans l’entrelacs des lettres les abysses et le ciel. C’est le fondement de l’humain. Tu sais qu’il n’y a pas de lumière sans ombre. Tu le sais mieux que personne, tu as traversé l’obscurité d’acier. » Extrait de Vivant jardin, Le Cerf, 2018.

Il existe un mouvement YANG de l’écriture qui vise à nommer, traquant sous l’épaisseur du langage la vérité flamboyante de l’être ; mais également un mouvement YIN où la langue se fait coupe – graal – pour accueillir toute humanité en elle.
Écrire, c'est accepter d'entrer dans le mystère de ce PROCESSUS. Celui que chaque atelier et retraite reconvoque en déclinant les différents aspects de celui-ci :

Nommer

Assumer son NOM c’est oser nommer, soit oser aimer. C'est accepter de se séparer d’une chair d’origine pour aller vers son devenir sujet dans le plein épanouissement de la langue. Où l’on découvrira que l’écriture – dans sa fonction YANG – est un outil de descente en soi-même à travers les lettres de notre nom qui nous constituent et nous fondent ; mais aussi regard sur soi par l’exploration des mots actifs en soi-même, dévoilant l’ombre et la lumière à partir desquelles nous inventons les fictions de notre vie.

Recevoir

Oser voir c’est oser RECEVOIR, entre ombre et lumière pour aller à la rencontre de la parole. Comment entrer dans la banalité de notre exception ? En supportant d’accueillir la langue inconnue que nous portons en nous-mêmes, mais aussi la parole de l’autre. En s’offrant comme terre d’ACCUEIL où planter l’arbre des générations et trouver notre juste place. Ce chemin intérieur, c’est celui que la littérature emprunte dans un rapport à l’écoute que dévoile la fiction.

Engendrer

Engendrer c’est donner naissance à la PAROLE en offrant au texte le souffle de vie, ce que les Grecs nommaient « psyché » et les Hébreux « âme ». Comment rencontrer – pour l’habiter – le silence, et ce vide de l’écriture d’où peut surgir le nigredo, cette part d’ombre que tout individu porte en soi pour en dévoiler la lumière? C’est l’essence spirituelle du verbe que de mettre à nu cette part poétique irréductible en l’Homme qui fait de lui un être humain. Quelques mots, quelques phrases suffisent à ouvrir les portes de la poésie qui n’est pas un genre, mais un rapport au monde.

Il s’agit d’expérimenter ce laboratoire qu’ouvre l’écriture vers la connaissance de soi, dans la découverte de ce qui entrave le déploiement de l’être. Écrire c’est se mettre en quête de sa langue qui est respiration, corps, souffle ; c’est forer en soi jusqu’à sa « clôture intérieure » dans un rapport intime aux mots. 


Avec l'écrivaine Laurence Nobécourt © Maryna Nikitchuk